« Chang, le petit Chinois aux yeux riququis qui mange du riz » : une comptine raciste apprise à l’école fait scandale

En 2018, les blagues racistes ne font plus tellement rire. Au mieux, elle suscitent l'indignation, parce qu'on a enfin compris que c'était problématique et que ça pouvait blesser certaines personnes. Au pire, Tonton Roger s'évertue à vous dire que c'est fâcheux, parce qu'au fond "on peut plus rien dire" et que le sketch de Michel Lebb sur les Africains est "quand même super drôle et un peu vrai, au fond". Ben ouais, Tonton Roger a un ami noir, en plus, voyez-vous.
Mais il semblerait que pour certains, les références racistes ne choquent toujours pas. Depuis quelques jours, sur les réseaux sociaux, une comptineau goût douteux, distribuée dans deux classes d'une école maternelle à Aubervilliers, fait polémique. En effet, la chanson raconte l'histoire d'un certain "Chang", "petit Chinois" qui "mange du riz" et qui a des "yeux riquiquis". Sympa. On apprécie la subtilité. Et vous, vous l'appréciez ?
Sacha Lin-Jung, président de l'Association des Chinois qui résidents en France, a tout de suite partagé la photographie du polycopié, qui s'avère être un florilège de stéréotypes anti-chinois. Ce même polycopié a également attiré l'attention de Dominique Sopo, président de SOS racisme, qui n'a pas mâché ses mots quant à cette comptine grossière, dans un long message posté sur son compte Facebook :
Remplie de clichés, avec tout ce que cela suppose de grossier, elle réduit les Chinois (et donc, dans l'esprit de beaucoup, les personnes d'origine asiatique) à quelques traits sommaires, avec une petite référence physique bien dégueulasse. Ainsi, le jeune Chinois dont il est question aurait des yeux "riquiquis" (terme péjoratif). Évocation très ethno-centrée qui consiste à voir la normalité à travers ce que l'on est soi-même. Remarquez ainsi que le Chinois n'a des yeux "riquiquis" que par le seule référence - implicite - aux yeux de l'auteure de la comptine qui pose donc son apparence en norme dont certains s'écarteraient (définition de l'anormalité...).
Dans la missive, le président de l'association affirme avoir fait une demande auprès du Ministère de l'Éducation Nationale pour que ce texte ne soit plus distribué dans les écoles. Une autre demande a été faite auprès des Ateliers du Préau, un organisme sous l'autorité duquel le texte semble apparemment circuler, pour se "désolidariser" officiellement du texte. Ces demandes ont été rapidement traitées par le Ministère qui s'est engagé de saisir le rectorat de Créteil, là où le texte en question a été partagé.
Du côté des Ateliers du Préau, qui ont été contactés par Le Figaro, hors de question d'être tenus pour responsables : « Nous ne sommes éditeurs de rien », expliquent Isabelle Halgand et Géraldine Prigent au quotidien Français. C'est leur intervenante qui serait à l'origine de cette comptine :
« Notre intervenante a apposé notre nom mais elle n’était pas censée le faire. Nous ne sommes pas signataires de ce texte qui a été donné dans deux classes dans une école à Aubervilliers. Il véhicule beaucoup de stéréotypes. C’est une grosse erreur, mais Suzanna Orsolato-Cazadieu n’a jamais eu aucune volonté de nuire »
Évidemment, les fondatrices des Ateliers du Préau accusent le coup. Elles déclarent, toujours au Figaro, que des sanctions seraient prises et que des excuses seraient présentées dès la rentrée prochaine.
Des clichés, probablement insultants, mais aucune discrimination d'une "race" la faisant passer pour inférieure.